Friday, July 30, 2010

Parsifal

Deux grands salons. D’un côté, des hommes en costume, enveloppés de fumée de cigarettes, de leurs voix graves, de regards fixés sur leurs chaussures. De l’autre, des femmes en noir, agglutinées, épaulées, des chuchotements, des reniflements, et un hurlement qui vient de temps en temps déchirer l’espace. Au milieu des deux salons, trône le corps d’un homme. Il est posé sur une table recouverte d’un drap blanc qui traine jusqu’au sol. A ses pieds, le crucifix. Tous unis par la chaleur humide, par la mort mesquine. Tous attendent un miracle. Les femmes attendent Jésus venir dire « Homme, lève toi ! », Les hommes attendent une brise de vent.

Elle a 4 ans et se cache derrière la porte du salon. Elle regarde cette femme maigre. La femme statue. Celle qui a les jambes serrées, les chevilles croisées. Celle qui a le dos vouté et le regard fixé sur un point imaginaire au sol. La petite sort de sa cachette, marche ostensiblement vers le corps en faisant claquer le talon de ses chaussures vernies et s’arrête au niveau de son visage. Elle sort de la poche de sa robe une paire de lunettes et la pose sur le visage du corps. Puis en souriant, elle se retourne vers la femme maigre et chuchote « Il a encore oublié ses lunettes ».

3 comments:

M1 said...

Parsifal.. "Bayrouth" .. bien sûr !
La petite fille dédramatise l'ambiance, une pointe de comédie, mais dramatique !

jo said...

:)
Je te lis toujours! Et toujours ce plaisir.
J'écrirai bientôt.

Négligeable Indécent said...

Au risque de te répéter ce qu'on t'a surement déjà dit : TU ECRIS BIEN !