Monday, November 8, 2010

A cause de toi

Je suis rentrée à 19 heures, débouchée une bouteille de Frascatti. Il est aimable mon vin. Comme un baiser timidement déposé sur ma nuque. Dans mon frigo, 2 poissons. Je n’arrive pas à détourner mon regard de leurs yeux vides. J’ai appris à les toucher, à côtoyer leur peau froide, rugueuse. A leur trancher la tête. Les arracher. Je prends du plaisir à observer leur blanc immaculé se transformer en caramel. La première bouchée est d’une légèreté. Si proche d’un souffle contre mon oreille. Mon verre sue en silence. Je le remplis. Je ferme les yeux pour mieux ressentir cette caresse veloutée du palais.

J’ai 20 ans, il est 7 heures du matin, l’odeur de mon village est différente de celle de ma maison. Le thé a un gout de racines et de jubilation ambigüe. Je crois que la vie peut se dérouler légèrement, avec tendresse et galanterie. Le fromage est un fromage de chèvre, il fond dans l’huile d’olive, le soleil dessine sur la façade de la maison, j’imagine des ombres qui se suivent, les secrets qui sont nés au pied des arbres, même le sable rampe sous mes pieds et les oiseaux me font une tresse.

J’ouvre mes yeux. Je suis dans ma cuisine. Solide, éternelle célibataire, professionnelle, distante. Il n’y a qu’à fermer les yeux de nouveau, ouvrir les narines, écouter les émotions sur sa langue et on y est. Minieh. Le matin jaunâtre, le temps au ralenti, l’accent du Nord, mes cousins étrangers, la poussière et la rosée sur les assiettes, la cloche de l’église et la voix de ma grand-mère.

2 comments:

M1 said...

Ton post est énivrant ! Les mots enchainent les images et c'est magique...

Anonymous said...

ta peau me manque